La Crise vue par les Recruteurs
" Le rôle d'un chef d'entreprise est d'anticiper et non pas de se laisser porter par les événements "
M. Benoît Guillon, 44 ans, titulaire d'un DESS de Finances et Stratégies Financière, a exercé le métier de trader pendant 12 ans.
Après avoir été directeur adjoint chez CGI pendant 4 ans et directeur général à l'ACMP IGEFI pendant 3 ans, il est maintenant président de Syninter SAS. Cette société est une entreprise de gestion des ressources humaines dans les domaines de l'intérim, du recrutement et de la formation.
Benoît Guillon nous donne sa vision sur l'année 2009, année annoncée comme une période de récession et de baisse de l'activité.
" Le rôle d'un chef d'entreprise est d'anticiper et non pas de se laisser porter par les événements "
" Malgré ce qui nous est annoncé pour l'année 2009, je ne suis pas négatif pour ce qui nous attend. En effet, la crise financière, je l'ai anticipé dès juin 2008, ce qui a permis de débuter l'année 2009 avec de nouveaux objectifs et de réorganiser mes priorités dès le 1er juillet 2008, nous donnant ainsi 6 mois d'avance sur nos concurrents, mais surtout sur nos clients.
Pour moi, 2009 ne sera pas une année négative, même si elle risque d'être une période d'attentisme, mais pas aussi importante que septembre, octobre et novembre 2008.
Depuis ce dernier trimestre, nous avons misé sur le développement, en créant des activités dans 9 régions de la France afin d'anticiper les mois à venir. Pour repérer une diminution des coûts d'exploitation, nous n'avons pas créé d'agence dans ces régions, mais nous nous déplaçons directement sur les chantiers.
En 2009, l'activité sera toujours présente car il y aura toujours des gros travaux de mis en place, comme par exemple l'aménagement des villes avec des logements, des lignes de tramway. Le second oeuvre marche très bien également ; en jouant sur les entreprises leader, l'activité existera toujours.
Selon moi, les différents effets de la crise seront sans doute plus marqués dans le secteur de l'industrie qui verra une crise peut-être plus longue et plus lente que les autres secteurs.
En ce qui concerne le BTP, personnellement, je ne suis pas inquiet.
Le seul bémol est le manque de vision de la part des chefs d'entreprises, qui peut s'expliquer par une certaine peur de l'avenir, alors ils se reposent sur le gouvernement en attendant ses propositions.
Le réel problème ne vient pas des offres de chantiers, car après les grands travaux, il ne faut pas oublier tous les appels d'offres qui promettent un certain dynamisme dans chaque région ainsi que le Grenelle de l'environnement qui oblige de nombreux chantiers à se mettre aux normes, entrainant une activité plus importante.
Mais, pour moi, le réel handicap vient des banques qui, malgré les décisions gouvernementales, mettent le frein sur les crédits et les assurances crédits. C'est cette difficulté qui est, pour moi une réelle inquiétude, car même si l'activité est présente, si les banques ne suivent pas, cela entrainera forcément des limites au développement.
L'année 2009 ne nous apparaît donc pas comme négative, elle sera une période pour se développer voire se redévelopper car il existe de réelles perspectives. Il est vrai que l'année sera sans doute plus tendue et difficile que les années précédentes, que le développement prendra certainement plus de temps.
La crise existe certes, mais beaucoup plus pour les défaitistes que pour ceux qui, sans être optimistes, pensent qu'il y a toujours des moyens et des solutions pour avancer. D'ailleurs, chaque nouvelle année, depuis toujours, s'appréhende avec un peu d'anxiété pour les entreprises. Certaines ont peur de ne pas faire aussi bien que l'année écoulée, d'autres ont peur de faire pire. C'est un peu l'histoire du verre à moitié vide et à moitié plein.
Cependant, il ne faudra pas être cette année dans une logique quantitative de l'activité, il faudra miser sur la qualité, et c'est cette qualité qui entrainera par la suite, la quantité.
Le rôle d'un chef d'entreprise est d'anticiper et non pas de se laisser porter par les événements. Pour ce qui nous concerne, notre anticipation vient du fait que nous nous déplaçons sur les lieux d'opérations, chez nos clients, ce qui nous fait regarder le vrai visage de l'économie, nous sommes en contact direct avec la réalité.
Aussi, même si nous n'avons pas d'agences pour nous représenter physiquement dans toutes les régions, nos nombreux déplacements et nos réseaux, comme les conseils généraux avec qui nous sommes étroitement liés, nous permettent de développer notre activité.
Ainsi, depuis le mois de septembre, aucun de mes collaborateurs ne m'a entendu prononcer les mots : licenciement, baisse de l'activité, mais plutôt les termes d'anticipation et de repositionnement. Et au contraire, nous avons même dû recruter 2 personnes supplémentaires à temps plein. Pour moi, toutes les entreprises qui baissent les bras donnent plus de chances aux entreprises qui, comme la mienne, les lèvent.
Si crise il y a, les entreprises comme la mienne ne voulant pas la voir, prendront les parts de marché de celles qui ne voient que la crise et rien que cela. "